DÉCORS HÉRITÉS I

Transposés sur d’autres supports, les décors de porcelaine, faïence et azulejos se montrent et s’exposent de défilés en biennales. A l’heure où les regards se tournent vers l’Orient et le Moyen Orient, dont les influences inspirent et se font de plus en plus ressentir, notre héritage occidental perdure dans le cœur des artistes et créateurs.

Pour la 55ème Biennale de Venise ; c’est un pavillon flottant que le Portugal propose, à travers le Trafaria Praia, projet mené par l’artiste Joana Vasconcelos.

Naviguant à travers le lagon, cette œuvre à la croisée du ferry boat lisboète et du vaporetto vénitien évoque les points communs de Lisbonne et Venise, 2 villes phares de l’expansion Européenne au Moyen Age et à la Renaissance. L’extérieur de ce cacilheiro est recouvert de carreaux de faïence peints à la main, directement inspirés d’une œuvre majeure des azulejos : le Great Panorama of Lisbon, et représente une vision de la ville avant le dramatique tremblement de terre de 1755. A l’intérieur, une œuvre textile d’exception nous immerge dans un univers sous-marin fascinant, amplifié par les mouvements au fil de l’eau.

Pour le défilé couture de l’hiver 2013, Giambattista Valli a parsemé sa collection de nombreuses allusions à des pièces maîtresse de la porcelaine, depuis

Invoquant tour à tour les manufactures de Capodimonte, ancienne manufacture du roi de Naples, puis celles de Wedgwood, Delft et Sèvres, avec des appliqués de dentelles, de ruban et d’organza en blanc sur blanc ou en bicolores. "Flowers and colors are what women want from me," déclara Giambattista Valli juste avant le défilé, "That's what I give them, but every time I get inspired by something different."

Connu pour ses découpages, assemblés à la main et transposés en assiettes, plats ou bols dans son studio new-yorkais, John Derian édite désormais une collection d’assiettes en mélaminé qui ressemblent à s’y méprendre à leurs modèles de faïence. Ces décors des plus classiques pourront désormais apporter une touche chic et décalée aux pique-niques et autres parties de plein-air!

Du papier à la porcelaine, de l’objet en volume à la surface écrasée et agglomérée, Ruth Gurvich aime à brouiller les codes. Chaque objet témoigne de cette démarche sensible en gardant les traces de sa métamorphose : traits de crayon tel un « patronage » soulignant les plis et les angles, motifs recomposés par l’écrasement de leur support initial. Tantôt feuille, moule, empreinte, les œuvres de papier et de porcelaine de Ruth Gurvich transforment les pièces de faïence du XVIIIème occidental, ou de porcelaine chinoise et japonaise dont elles s’inspirent. Une rigidité fragile et une délicatesse rare qui étonnent et émeuvent.

Dernier en date, le défilé Dolce Gabanna sublimait la féminité et la noblesse sicilienne pour le prêt-à-porter été 14. Des multiples facettes historiques et culturelles de la terre d’origine de Domenico Dolce, c’est auprès des interactions de l’île avec la Grèce ancienne que le duo a cette fois-ci puisé son inspiration. “It’s a dream of Sicily,” commente Stefano Gabbana. “Like, you go on holiday to Syracuse or Taormina, and you see the Greek theater, then you come home and dream about it.” Une collection dominée par un travail extraordinaire d’artisanat et de recherche matière. Impressions digitales, fleurs peintes et brodées, jacquards sur-imprimés et soieries laquées répondent aux bijoux et coiffures, et semblent en effet tout droit sorties d’une image fantasmée et sublimée de la splendeur gréco-romaine.